La relation d’aide s’exprime au travers de la mise en œuvre de 3 grandes attitudes décrites par Carl Rogers, le fondateur de L’approche centrée sur la personne : la compréhension empathique, la congruence, la considération positive inconditionnelle.

Nous pourrions penser que si nous respectons à la lettre la mise en place de ces trois grands principes, nous saurions être les sophrologues professionnels avertis que nous espérons devenir. Hors au-delà de la technicité propre au savoir-faire du professionnel, cette science de la relation humaine prend peut-être tout son sens dans l’intérêt réel, l’écoute active, l’engagement authentique de « l’humanité » de la personne de l’aidant auprès de « l’humanité » en souffrance de la personne de l’aidé. Une question d’authenticité humaine, de respect mutuel, d’intimité dévoilée et partagée, de confiance réciproque qui engage profondément la personne de l’aidant.

La sophrologie, plus qu’une méthode, une philosophie de vie, s’est dédiée corps et âme à l’exploration et au dévoilement de la conscience sous l’impulsion de son créateur, le docteur Alfonso Caycédo qui nous a quitté tout récemment.

Alfonso Caycedo, Carl Rogers 2 éminentes personnalités qui ont creusé un sillon novateur au service de la personne, tous deux créateurs mais aussi tous deux dépositaires des avancées de leur siècle et qui en disparaissant, nous posent peut-être là, leur ultime questionnement.

La sophrologie a besoin de la relation d’aide pour exister

La relation d’aide centrée sur la personne n’a pas besoin de la sophrologie pour exister. Preuve en est des nombreuses ramifications qu’elle a fait naître telles le « caring » en soin infirmier. Alors qu’aurait à apporter dans ce lignage prestigieux, la modeste sophrologie qui en est encore en France à s’imposer dans le paysage fleurissant des thérapies à médiation corporelle et au regard de la médiatisation de la méditation de pleine conscience ?

La sophrologie fait de la conscience son objet premier de recherche. La relation d’aide ne peut se passer de conscience pour s’exprimer.

C’est peut- être là que la sophrologie a sa part d’innovation. En effet qu’est-ce que le savoir ou plutôt qu’est-ce que l’intuition du fonctionnement de la conscience peut apporter au savoir-être dans la relation d’aide ? En étant volontairement simpliste, la sophrologie accueille, accueille et accueille encore.

Mais que veut bien dire accueillir et accueillir en conscience ?

J’entends souvent…

il faut accueillir, nous devons conserver une juste distance, il faut nécessairement appliquer une technique dans une séance pour faire de la sophrologie… ou encore : les personnes que nous accueillons ont du mal à s’exprimer lors des phénodescriptions, elles doivent rester assises ou elles ont du mal à rester debout, l’alliance doit s’instaurer rapidement pour que la relation s’installe, les personnes doivent s’entraîner chez elles pour respecter la loi de la répétition vivantielle… et puis : que dois-je faire si elles pleurent ? il faut s’adapter à la personne…

Que d’injonctions, que de contraintes, que d’ordres, que d’attentes !

Comme si c’était la personne du sophrologue qui était au cœur du processus sophrologique et non la relation.

Comme si la responsabilité du développement de la personne nous incombait entièrement, en oubliant que si nous sommes là, c’est bien que ces personnes ont besoin de la méthode et non l’inverse.

Car voilà la question : qui est au cœur du processus ? La personne du sophrologue dans le respect intégral de la méthode ou bien des consciences qui en s’entrelaçant dans le champ ouvert de la relation, s’éveillent à elle-même, chacune dans la perception l’une de l’autre ?

« La conscience est ce faisceau qui choisit nécessairement ce qu’elle éclaire ». La conscience ne doit pas, la conscience est dynamique, énergie. Elle est toujours et nécessairement conscience de…

Le mental a des obligations, des devoirs… La conscience a des besoins, des envies… Elle s’actualise d’elle-même pour peu que nous lui prêtions cette capacité et que nous lui en fournissions le contexte favorable. L’alliance ne me paraît pas être cette relation d’égal à égal sinon dans cette posture assumée de sujet à sujet. Il n’y aurait des niveaux supérieurs de conscience que si nous admettions l’existence de niveaux inférieurs et donc une infériorité, pour ceux qui la vivent.

La « neutralité bienveillante », la « juste distance » invoquées à tout bout de champ, servent bien trop souvent à nous cacher de nos mécanismes dysfonctionnels et à préserver un mental cherchant éperdument à nous assimiler à son développement. Et quand bien même nous serions ce mental envahissant, ce Moi défensif qui nous sert de protection, que craignons-nous à le reconnaître, sinon de nous en libérer ?

J’assume volontiers mon positionnement dans les principes et lois de la méthode que je revisite sans cesse au regard de mes nouvelles compréhensions. Inutile de m’en faire un drapeau. Une personne chère à mon cœur et à mon développement professionnel m’a dit un jour : « n’essaie pas, fait seulement ! »

Depuis ce jour je fais. Non, je suis ma posture seulement. Quitte à me tromper. Et ce « seulement » m’engage doublement à répondre en conscience aux besoins de la conscience de mes clients. Et c’est ici et maintenant que la posture phénoménologique nous vient heureusement en aide en nous permettant d’installer cette incarnation dans les multiples réalités de la relation sujet-sujet, en se dévoilant à nos nouveaux regards. Et c’est ici et maintenant que la relation d’aide phénoménologique vient à notre rencontre pour de nouvelles rencontres.

Un exercice, si vous le voulez bien pour entamer ensemble ce processus : remplacez les  « il faut que… », les « je dois… », par « j’ai besoin de… », « de quoi ai-je besoin ? ».

Vous mettrez ainsi votre mental au service de quelqu’un de bien plus grand que lui : votre Conscience… ce lieu paisible et silencieux qui sait qui vous êtes et ce dont vous avez besoin.
Et quand bien même vous vous n’y arriveriez pas, prenez en conscience tout simplement.

Auteur : Patricia Gotteland (formatrice)

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